Lehman Brothers: le rapport qui condamne (2024)

Lehman Brothers: le rapport qui condamne (1)La faillite de Lehman Brothers a fait couler beaucoup d’encre et bon nombre de commentaires considèrent que le Gouvernement américain a commis une grave erreur en ne sauvant pas Lehman. Tout en reconnaissant les conséquences dramatiques de cette faillite, je voudrais m’inscrire en faux avec cette affirmation. Tout d’abord, c’est le Gouvernement britannique qui a empêché Barclays Bank de racheter Lehman Brothers pour des raisons bureaucratiques. Alistair Darling, le Chancelier de l’Echiquier (Ministre des Finances de Sa Gracieuse Majesté) a réagi avec immaturité et Barclays n’a pas vu voir l’orage. Il était trop tard pour une alternative le dimanche après cette décision britannique.

La seconde raison est sur le plan éthique: Lehman méritait de faire la culbute. Il n’y avait aucune raison de sauver une banque d’affaires qui a autant dysfonctionné. Cette affirmation vient d‘être renforcée par un rapport de 2.200 pages sur la déroute de Lehman Brothers qui a fait apparaitre, non seulement des erreurs de jugement, un orgueil au-dessus de toute mesure, mais également des fraudes comptables qui vaudront probablement aux principaux dirigeants de Lehman d’être trainé devant les tribunaux, même si avec une belle unanimité ils ont répété ce que leurs avocats leur ont dit de dire: nous n’avons rien fait de mal. Quant a Ernst & Young qui a «concocté» le camouflage comptable, ils sont également dans le collimateur et récusent toute «professional malpractice». Cela a permis à Lehman Brothers de sous-estimer de $ 50 milliards son endettement.

Ce rapport est l’œuvre d’Anton Valukas et a été demande par un tribunal américain. Ce n’est donc pas un document qui peut être ignoré. Il s’agit d’une des pratiques les plus répandues et légitimes dans le secteur bancaire, à savoir les moyens divers et variés dont certaines dettes sont reléguées hors-bilan et donnent une image embellie d’une situation financière compromise. Il est courant pour les banques de vendre des obligations avec une clause de rachat: c’est le «repurchase agreement» qui se pratique entre banques, mais aussi avec les banques centrales. Ce n’est qu’une autre forme de financement de la position, pas une forme de camouflage. La disposition utilisée par Lehman est connue sous le nom de «Repo 105». Elle permet de comptabiliser l’opération, non comme une vente avec rachat, mais comme une pure vente.

Le silence des banques suite à ce rapport donne une mesure de leur embarras: une enquête vient d’être lancée pour savoir si -par hasard- cette technique n’était pas utilisée par d’autres banques et si nous n’allons pas découvrir un usage plus répandu de ce système. Jusqu’à présent, il semble que Lehman ait poussé cette technique trop loin, plus loin que ses collègues. La Federal Reserve vient de contacter les banques dans des coups de téléphone «inquiétants» sur le Repo 105. Ces transactions n’ont jamais été communiquées par Lehman Brothers à ses autorités de contrôle, ses investisseurs ou les agences de notation. Goldman Sachs et Morgan Stanley ont fait savoir qu’ils n’avaient jamais utilisé ces techniques.

La partie la plus symptomatique est que la transaction a du être effectuée a travers la branche britannique de Lehman Brothers. Pour des raisons fiscales? Non, parce qu’il ne s’est pas trouvé d’avocats américains prêts a valider l’opération tandis que Lehman a trouvé des avocats plus «compréhensifs» que les américains, en l’occurrence Linklaters, la première firme d’avocats du Royaume Uni. Ils font partie du «cercle magique» des top law firms. La naïveté de la défense présentée par Linklaters est difficile à comprendre. «Nous ne savions pas que des avocats américains avaient refusé de donner une opinion sur ces transactions». Parce que dire ce qui est légalement correct dépend de ce que font les collègues?

Les ondes de choc de ce rapport menacent à la fois Wall Street, les avocats et les firmes comptables. On craint une répétition d’une faillite d’Ernst & Young comme celle qui a précipité Arthur Andersen, les «auditors» d’Enron. D’autant plus qu’ils semblent avoir refusé d’examiner un message de dénonciation venant d’un cadre britannique de Lehman Brothers. Elle aura a repondre a de nombreuses questions.

Malgré cela, Il semble que personne n’irait prison. Ni Dick Fuld, le patron, ni deux des trois directeurs financiers de Lehman qui se sont succédé en deux ans (le troisième est resté trois mois), ni les comptables. Aucun d’entre eux ne pouvait ignorer qu’il s’agissait de camoufler une opération avec clause de rachat en vente pure et simple. Il reste à voir ce que les autorités américaines vont faire: on voit mal comment ils pourraient éviter de poursuivre -au civil ou au pénal- les parties concernées.

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